Maître Aultern, Seigneur du petit royaume de Téolyau, Prince d'Arumo, un jour, prédit son déclin. Il vit ses forces lui manquer à l'aube d'un lendemain de tempête par delà soixantes solstices. Ses songes lui montrèrent sa propre mort.
Dès lors, il tenta de mettre tout en oeuvre pour éviter ce funeste destin. Voyant que ce combat fut vain et que le moment de céder sa vie approchait à grandes enjambées, il sombra dans la plus profonde mélancolie. Il compara son noble sang à une mixture abjecte drainant le néant. Il renonça à la gérance de son fief à la faveur de son valet de chambre. Et il s'en alla parcourir ses terres le cou courbé, les bras ballants.
Tel un mort au domaine des vivants. Il alla jusqu'à l'extrême ouest, infléchissant ses pas vers le nord en redescendant ensuite vers l'est et boucler sur le sud pour s'en revenir au centre de sa nation. Ce ne fut qu'au balbutiement de la journée, alors que les fenêtres ne reluisent plus de la lueur des lumières que, lui le Peiné, l'Abattu, le Découragé, le Mort en sursis retourna ainsi à sa demeure.
Cependant, une chose qu'il n'aurait jamais imaginé le surprena. Son chief lieu était intacte. Les murs des maisons, les rues, tout était identiques à ses souvenirs. Lui qui croyait que son périple allait engendrer une autre réalité, il a été déconcerté. Il continua tout de même son chemin jusqu'à sa propre enceinte et decouvrit également que rien n'avait changé. La table de banquet était toujours à la même place. Le même tableau au même endroit. Le sofa de lecture toujours intacte comme préservé du temps. Le prince en fut déféré. Il monta jusqu'à ses appartements. Là aussi, la même inertie. Et pourtant. Oui, pourtant. Il n'y avait pas de poussière. Ce n'était pas un lieu abandonné. Non, en en a pris soin.
Curieux, il décida donc d'investir son office. A sa surprise, il y trouva son régent, Niorma, accomplissant les tâches administratives coutumières. Un soupçon de chagrin lui prit le coeur un instant; il aurait bien aimé que le gouverneur soit toujours lui. Comme si le temps avait fait le même cycle que son voyage et le ramenait au temps passé. Il contempla donc son rival à son travail. Lorsque ce dernier releva la tête et qu'il reconnu son invité inattendu, Aultern reçu un autre choc en l'entendant se faire appeler Prince, de s'entendre dire que son acolyte était heureux de le revoir, de savoir qu'il sétait occupé des obligations de la fonction tout comme lui et proposer de reprendre la patrie en main. Attéré, effrayé par la situation, le monarque sorti de la batisse. Etonné, abasourdi.
Le coq chanta et les foyers commencèrent à s'activer. Le peuple commença à sortir et à vaquer à leurs occupations quotidiennes. Que ne fut pas la surprise du prince en voyant que les gens ne le dévisagèrent pas, qu'ils lui firent montre du respect d'antant. Que les coups bâtons, les injures et les menaces ne furent que de viles chimères. Qu'ils l'appelèrent toujours "Majesté" ou "Votre Seigneurie". Il en était ivre d'interrogation, titubant devant autant d'imprévu aussi surprenant. Il avait envie de rire et de danser.
Il retourna donc à son bureau. Il contempla à nouveau son régent. Le pris quasi de force par le bras et l'amena sur la place publique. Il demanda à un gosse d'aller chercher Civnent, le notaire réputé pour sa droiture à qui il demanda, après avoir rassembler la population, de consigner ses paroles.
«
Mes chères et chers compatriotes. Je vous ai fait réunir aujourd'hui, jour même de mon retour pour vous dire ceci.
Par peur de la mort, je vous ai laissé à l'abandon. J'ai renié les liens qui vous unissaient à moi. J'ai pris le chemin pavé de terres glaises et de pluies incessantes. Durant mes voyages, je n'avais même pas relevé la tête. Et ce n'est qu'en ce matin même que ce qui du m'être révéle s'est fait connaître.
A ma grande surprise, j'ai constaté que rien n'avait changé. Là où je pensais trouver désolation, il y a une vie. Je l'avoue, j'ai été un peu peiné. Mais ensuite, j'ai compris.
Vous n'avez pas abandonné espoir. Vous ne vous êtes pas dit que la force d'un pays ne tient que dans un seul homme et vous avez continué à défendre votre vie. Je vous applaudis.
De plus et malgré ma capitulation, vous m'avez encore fait montre de respect. Je vous en suis reconnaissant.
Ca me paraît, à mon esprit pour l'instant embrumé d'une liesse ancestrale, tel un pardon. Je vous en remercie.
Niorma, ici présent, s'est fort bien occupé des tâches administratives et diplomatiques de notre nation. Je lui suis redevable.
Comme vous le savez tous, je n'ai pas de femme et, donc, aucune descendance. Certes, c'est dommage. Et vous connaissez tous mon destin qui arrivera dans peu de temps. Je n'ose donc pas avoir un enfant et laisser seul ma compagne s'en occuper. J'y renonce.
Cependant, ce matin même, j'ai vu mon fils. Oui, j'ai un fils! Un fils spirituel. Niorma. Approche-toi, s'il-te-plaît! Voici mon fils! Celui qui a prouvé qu'il pouvait gérer notre patrie et la maintenir. Mais ce n'est pas tout, j'ai découvert des cousins, des cousines, des neveux, des nièces, des amis. Vous tous ici m'avez donné ce que je m'étais interdit de recevoir: une renaissance. Vous tous m'avez montré que la chose qui importe, c'est la vie. Qu'une tâche ne s'effectue pas par un seul individu mais qu'elle peut passer par plusieurs génération. Que ce n'est pas le sang qui fait avancer les êtres mais l'esprit.
C'est pourquoi, je veux que vous sachiez que j'abdique de ma fonction de monarque au profi de mon fils, Niorma. Je ne serai plus votre souverain mais un membre quelconque de notre communauté.
Je tenais à ce que vous le sachiez.
Dites moi, votre Seigneurie. Les caisses de l'état sont-elles suffisament approvisionnées pour organiser un festin en ce jour heureux?
»
Dès lors, Aultern, commun parmi les commun passa ses jours au labeur quotidien, en passant les soirée à chanter, danser et rigoler jusqu'à l'heure de sa mort. Comme la fatum l'avait prédit. A un détail près. Les révélations montrait le Prince apeuré face à la mort. Mais c'est avec une sérénité et un certain détachement qu'il l'accueillit. Et sur sa tombe, il fit inscrire:
« Sois triste que ce soit moi qui git ici. Sois heureux que ce ne soit pas toi. »
Il y avait un moment que je voulais écrire un truc du genre. Le départ d'un ami était une bonne opportunité.
Bonne chance à toi dans tes nouvelles directives. On se téléphone, on se fait une bouffe. Ou on se MP et on se fait Orozar ^^
Hmmm et pour clôture ça!